Dans quelques jours, nous commencerons notre entrée en en Carême :
Sans doute n'est-il pas mauvais d'y penser dès maintenant, pour ne pas risquer de nous retrouver à Pâques en étant passé à côté de ce temps de grâce qui nous est offert par l'Eglise. Car le Carême est bien un temps de grâce. Pourtant, nous le voyons généralement arriver sans trop d'allégresse. Le plus souvent, nous entrons en Carême comme on plonge dans l'eau froide "parce qu'il faut y aller". Aussi accueillons-nous un peu craintivement la triple invitation que nous adresse Jésus : "Priez, jeûnez, faites l'aumône." (Evangile de la messe du Mercredi des Cendres : Matthieu 6, 1-6, 16-18).
• "Nul n'apprécie spontanément le Carême, comme il est naturel. Mais ceux qui ont fait l'effort de le pratiquer pour de bon savent combien c'est un temps profitable. On n'aime pas le Carême, en effet, parce qu'on ne le prend pas assez au sérieux."
Et nous ne le prenons pas assez au sérieux parce qu'il nous fait peur. Alors, nous restons comme l'apprenti nageur qui s'assied au bord de la piscine sans oser y plonger, tâtant l'eau du bout d'un orteil frileux, tremblant de froid à l'avance et paralysé par la crainte. Tant qu'il n'aura pas sauté, la piscine lui semblera un endroit peu sympathique et il ne pourra pas comprendre la joie de ceux qui barbotent allègrement. Celui qui fait semblant de se baigner ne connaît de la baignade que le désagréable contraste entre la tiède douceur du soleil et la morsure de l'eau froide. Celui qui fait semblant d'entrer en Carême n'en connaît que le goût de poussière.
• L'amour du Christ est premier : si nous entrons en Carême, ce n'est pas pour mériter l'amour du Christ, mais parce qu'Il nous aime et nous rend capables de L'aimer.
Le Carême est une réponse d'amour à l'amour de Dieu et cela le distingue absolument de toute autre forme d'ascèse. Il ne s'agit pas de collectionner le plus grand nombre possible d'efforts et de sacrifices mais de répondre le plus généreusement possible à l'amour de Jésus.
• Le Carême est une réponse d'amour : mais l'amour n'est pas désincarné.
Il ne suffit pas d'éprouver quelque sentiment ou intention pieuse. Il faut prouver cet amour, le vivre concrètement : d'où l'importance et le sens de tous les actes d'amour gratuit que sont les petits (ou grands) renoncements auxquels nous incite le Carême. Ne cherchons pas de choses compliquées… nous risquerions de passer notre Carême à chercher un "beau" sacrifice à offrir au Seigneur, en oubliant des dizaines de petites choses quotidiennes telles que renoncer à regarder une émission de télévision, éteindre sa cigarette, manger du pain sec au goûter, ne pas resaler la soupe, etc.
• Le Carême n'est pas une démarche individuelle : chacun dans son coin, essayant de "réussir son Carême".
C'est une démarche à la fois personnelle et ecclésiale : personnelle, parce que le Christ aime chacun de nous et attend une réponse personnelle à cet amour ; ecclésiale, parce que c'est toute l'Eglise qui, ensemble, entre en Carême. "Le Carême est cette retraite unanime où l'Eglise se recueille pour mieux s'approcher de Dieu."
Préparons l'entrée en Carême : demandons à Marie de nous aider à y entrer généreusement, dès mercredi prochain, elle qui sut - mieux que tout autre - répondre à l'amour de Dieu. Et relisons saint Paul : "Je tiens tout désormais pour désavantageux au prix du gain suréminent qu'est la connaissance du Christ Jésus mon Seigneur. Pour lui j'ai accepté de tout perdre, je regarde tout comme déchets, afin de gagner le Christ" (Epître aux Philippiens 3, 8).
Don Vincent Clavery
